Nous sommes tous Palestiniens

Publié le par Filip

Voilà, c’est le temps du départ, 15 jours c’est court, mais je repars avec tant d’images, d’odeurs, de soleil …


1h30 : Je suis dans la rue avec Elen, on attend le taxi, il fait doux, la ville est calme, au bout de la rue les boulangers s’affairent. Une voiture arrive, elle s’arrête à notre hauteur et nous lance « How do you know it’s me ? » … Ben ouai, on ne le connaît pas, c’est une voiture banale, ce n’est même pas un taxi, c’est  Michel un copain de George qui habite en Israel (Plaque d’immatriculation jaune).


Je fais mes adieux à Elen et monte dans la voiture avec ma grosse valise, c’est parti. On s’arrête déjà à 100 mètres pour acheter du pain chaud. Et on part pour de bon, là il me propose du pain que je refuse, je n’ai pas faim alors il me dit « Mange ! » sur un ton qui ne me laisse pas le droit de refuser, en plus il est super imposant, grand et large.

On sort de Bethléem et arrive au premier check-point … Ca commence … on sort de la voiture et se plante devant les soldats armés, ils font le tour et me demandent d’ouvrir mes bagages. Et tout de suite ils commencent à m’emmerder, il y a des keffiehs au dessus : « Why have you got that », « That is Palestinian », « You are for Palestinians » … Moi j’ai perdu mon anglais, je souris et je dit « Gifts », ils parlent avec Michel veulent me faire passer à pied le contrôle, finalement ils nous laissent repartir ensemble. Là, Michel me demande si je n’ai rien d’autre de compromettant, rien de « politique », je le sens un peu inquiet.


A Jérusalem, il téléphone à quelqu’un pour lui demander de nous accompagner, il n’a pas envie de faire le trajet de retour seul. Il rage contre les rues barrées pour travaux, s’engueule avec les ouvriers et force le passage. Il récupère son amie qui lui apporte du zaatar pour mettre sur son pain et on roule vers Tel Aviv.

 

2h30 : On s’arrête pour mettre du carburant, Michel revient dans la voiture et m’explique :

Tu vois là, il y a un contrôle, (je n’avais pas fait attention), donc tu va marcher avec ta valise pour passer, tu avanceras sur 200 mètres et je te récupèrerai plus loin, si on reste ensemble ça sera compliqué …


Je sors donc et avance vers le check-point en trainant ma valise. Les soldats, jeunes, leurs armes à la main m’attendent avec un air sévère. Arrivé à leur hauteur, ils commencent à me parler … Je ne comprend plus du tout l’anglais et je leur souris en parlant français : « aéroport , Zurich … ». Là, une chef, qui ne prend pas la peine de se déplacer commence à me questionner de loin, elle crie en français et sans accent (Et merde…), mais elle n’est pas trop chiante, elle trouve simplement étonnant que j’aille à l’aéroport à pied … Je lui dit que j’y vais en stop, alors elle donne les ordres en français aux autres qui n’y comprennent rien et refusent de me laisser repartir. Finalement après que je l’ai interpelée elle leur dit en hébreu de me laisser avancer.

 

Après deux cent mètre Michel arrive à ma hauteur et nous repartons vers l’aéroport où nous arrivons au bout de 10 minutes.

 

Le pire n’est pas passé …

 

3h00 : Je rentre dans le magnifique aéroport, il y a du monde partout. Je montre mon billet d’avion et une jeune femme m’indique la file à suivre.

 

1er interrogatoire : dans la file, de jeunes agents passent de personne en personne et posent des questions à la con : « D’où venez-vous ? Qui avez-vous rencontré ? Comment s’appellent les amis de votre femme ? Quels sont les prénoms des enfants dans sa classe ? Où êtes vous allés …


Je répond, moitié en français, moitié en anglais, je fais celui qui ne comprend pas bien … Enfin il colle une étiquette avec le numéro 3 sur mes bagages et mon passeport. Les numéros vont de 1 à 6 : 1) On te fait passer avec un gros bisous sur la bouche, 2) tu passes tranquillement, 3) C’est pas mal, 4) Ca passe, 5) T’es emmerdé, 6) T’es super emmerdé … Au-delà, je pense que tu es fusillé sur place !

 

La valise passe au scanner, je la récupère et là on m’indique un bureau de fouille où je me rends en ralant et ouvre ma valise.

 

Mais voilà, les keffiehs sont toujours au-dessus, la jeune femme interpelle ses collègues et me fais la gueule.

 

2ème interrogatoire : Pourquoi avez-vous ça ? Où les avez-vous achetés ? d’où venez vous ? …

Je répond tant bien que mal pendant qu’elle fouille la valise et scan les liquides (Jus de raison, huile d’olive …). Je suis vraiment en colère, j’en ai marre. Mon numéro 3 a dû se transformer en 5 ou 6 parce qu’elle appelle un autre agent.

 

3ème interrogatoire : Toujours les même questions sur un ton désagréable, il insiste, je fais le niais, je suis super en colère de voir ces jeunes (tu presses le nez et il y a encore du lait qui coule) faire chier le monde mais je reste calme. Ils  font leur sale boulot comme on leur a demandé …

 

4h30 : enfin je peux récupérer ma valise et me rendre au comptoir d’enregistrement, je suis triste, fatigué et super-super en colère. Je veux quitter au plus vite ce pays de fous.

 

La colère mettra du temps à s’estomper dans l’avion, y a plein de Rabbi Jacob qui se lèvent pour faire leur prière en s’espionnant pour voir lequel sera le plus dévot. Ca m’écœure, je n’arrive même pas à dormir. Je suis à bout.

 

Vive la liberté, vive la Palestine, vive la vie.

Publié dans voyage

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T
<br /> ben moi j'aime bien les recettes de cuisine et aussi la dissonance sémitique je trouve ça intéressant. Mais il ne faut pas prendre les silences comme des gènes. C'est juste que les gens ils n'ont<br /> pas envie de commenter et ils n'ont pas non plus que ça à faire,tu vois ? Alors que les recettes de cuisine, tu vois, c'est un peu de bonheur dans toute cette galère. Moi, c'est ma façon de faire<br /> l'autruche et je suis fière de mon côté autruche, tiens ! et puis c'est vrai quoi arrête et donne ton vrai nom ! arrête ! tu crois que les services secrets israéliens vont venir te tirer une balle<br /> ? Ils s'en fichent, ils ont autre chose à faire (par exemple emmerder les iraniens)... Je te préviens, si tu c'est toi François Alexandre, je te prie d'ouvrir ton blog personnel !<br /> <br /> <br />
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T
<br /> <br /> dissonance cogniticosémitique plutôt <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Merci Jeanine, oui le film "No way through" effectivement il est bien, mais dans le fond ce n'est qu'une fiction, c'est peut-être exagéré, la réalité n'est peut-être pas si terrible, peut-être que<br /> ce film fait appel à nos émotions pour nous manipuler...<br /> Ou à l'inverse la réalité quotidienne des checkpoints est encore plus terrible pour ceux qui la subissent mais les médias l'ignorent, les masses en ont pris l'habitude et on en parle plus.<br /> <br /> Dans mon post il y avait aussi l'allégation "choquante" qu'Israel serait le vrai perpétrateur des attentats du 11 septembre.<br /> Choquante car en dépit des controverses on entend rarement celà ailleurs.<br /> Et là silence: aucune réaction des lecteurs du blog...<br /> Il y a pourtant des preuves pour qui veut chercher (certes majoritairement en anglais..):<br /> http://theinfounderground.com/forum/viewtopic.php?t=5367<br /> Ce silence, cette gène qui fait qu'on préfère toujours causer de recettes de cuisine, s'explique par la "dissonance cognitive" qui est bien décrite ici:<br /> http://www.henrymakow.com/cognitive_dissonance_a_fact_of.html<br /> <br /> Voilà puissiez vous ouvrir les yeux et relier les points.<br /> <br /> antimythe<br /> <br /> <br />
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F
<br /> <br /> Je pense que ce genre de débat n'est pas l'objet de ce blog. Nous souhaitons simplement raconter ce que nous vivons, notre ressenti par rapport à un vécu.<br /> <br /> <br /> Il y a certainement beaucoup de choses à dire sur la situation en Palestine et en Israel, le plus difficile étant d'avoir un discours qui ne soit ni partial, ni partiel ... L'information est<br /> souvent tronquée ou même fausse, tous ces films que l'on trouve à droite, à gauche sont intéressants ... Mais où est la vérité, où sont les vérités.<br /> <br /> <br /> Ce blog se veut un endroit d'échanges entre amis, on utilise donc nos prénoms et non des pseudos comme dans les réseaux dits "sociaux" où chacun est l'ami de tous.<br /> <br /> <br /> Il faut sûrement s'informer et informer ... agir et militer ... Il y a des lieux pour cela, des groupes qui existent déjà.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> je suis allée voir le film "no way through", dont parle "antisioniste", c'est édifiant....j'envoie le lien par mail aux gens que je connais...je pense qu'il faut vraiment transmettre le plus<br /> possible...(je radote, désolée !)...<br /> jeannine<br /> <br /> <br />
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J
<br /> lire ton arrivée et ton départ de palestine est impressionnant, et nous nous rendons compte que nous sommes très mal informés de ce qui se passe là bas....joel a tapé "checkpoint palestine" sur<br /> google et nous avons pu regarder des vidéos tournées à différents checkpoints.....à vrai dire je ne suis pas restée tout regarder tellement je trouve cela ignoble et odieux la façon dont les<br /> palestiniens, hommes, femmes et enfants, sont traités...joel me faisait remarquer que ces vidéos sont très peu regardées (le nombre de "visionnages" est indiqué) ce qui montre combien la communauté<br /> internationale n'est pas intéressée ni consciente (enfin les petites gens comme nous) des conditions de vie des palestiniens .....<br /> je me disais qu'une petite chose que l'on peut faire à notre niveau, c'est d'aller voir ces vidéos et chercher l'info...et en parler autour de nous, qui avons la chance d'être né dans un endroit<br /> plus confortable.....<br /> merci elen et philippe de prendre le temps de nous raconter tt cela...<br /> kenavo ha peoc'h war an douar....<br /> jeannine<br /> <br /> <br />
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S
<br /> Bonjour Philippe : Il faut absolument que tu viennes à Brest nous raconter de vive voix toutes ces péripéties abracadabrantesques.... Pourrais-tu venir manger rue Rodin mercredi 1er décembre (midi)<br /> avec Olier et peut-être Anna et Eric ?<br /> pokou<br /> Soazig<br /> <br /> <br />
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